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d de kabal - le rap le plus long كلمات الأغنية

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[couplet 1 : d’ de kabal]
c’est l’histoire de quatre potes
qui se connaissent depuis toujours, enfants de notre époque
ils sont de cultures différentes, cela ne les a jamais gêné
aujourd’hui c’est plus complexe, les événements ne cessent de les opposer
isaac, samba, aimé et brahim observent alentours, voient que la société déprime
isaac, samba, aimé et brahim semblent se noyer dans un bien mauvais film
ces quatre là sont tellement, tellement proches
qu’ils ont exactement les mêmes diplômes en poches
cependant brahim et samba ne comprennent pas, ces deux-là ne travaillent pas
aimé, après avoir dû plusieurs mois errer
a dû se contenter d’un cdi au ptt
isaac est très embêté pour les siens mais il n’a pas à se plaindre
au bureau il se camoufle, ne la ramène pas, du coup il mange à sa faim
il se tient loin des discussions sur les apt-tudes génétiques des uns et des autres
l’arabe est fourbe, l’africain robuste, l’antillais paresseux mais ce n’est pas de leur faute
palabre autour de la hiérarchie des races pendant les pauses à la cafèt
isaac ne bronche pas, il leur exploserai bien la tête
les quatre frères se retrouvent souvent tard le soir
arrivent à se persuader que rien ne les sépare
mais un filet d’amertume s’écoule le long des parois de leur amitié
les quatre frère retournent à leurs quotidiens, les différences muent en inégalités
y a eu des mots un peu durs la nuit où aimé et samba ont débattu de l’afrique et des antilles
brahim et isaac ont tentés en vain de revenir sur les ratures
rien n’y a fait les noirs entre eux sont vraiment trop sensibles
aimé et samba eux n’interviennent jamais lorsque leurs potes se piquent à vif
les noirs n’ont pas leur mot à dire sur les questions qui opposent les arabes et les juifs
tellement de conneries qui circulent entre le monde et les quatre frères
ils sont là, ils se chamaillent, personne pour éplucher leur vocabulaire
noirs, nègres, esclavage, traite, colonies
territoires occupés, juifs, intifadas, arabes, colons, guerriers, terroristes
les bons amis aussi se disputent, c’est dans l’ordre des choses
les mots fonctionnent comme des pet-tes piqûres, laissent des ecchymoses
mais à force de provocations et de p-ssions parfois on déclenche l’argumentation de trop
trop loin, trop-trop-trop loin, ils sont allés trop loin cette fois-là
brahim et samba ont dressés une liste tellement sordide
ils ont dit que dans ce monde n’avait pas la même valeur leurs quatre vies
que celle de samba ne valait rien
que juste à côté en contrebas se tenait celle de brahim
aimé et isaac ont exprimés leur désaccord
les mots ont fusé, ont revêtu leurs habits de mort
au détour d’une phrase, d’un raisonnement idiot
une idée obscène est apparu en provenance de leurs quatre cerveaux
un pari à la mise impossible, aux règles barbares
un jeu au déroulement morbide, même pas un jeu de hasard
une nuit d’un mois de décembre les quatre frères se donnent rendez-vous
les quatre frères tremblent par une froide nuit d’un hiver sombre
les quatre frères s’agitent et s’embourbent dans la pénombre
sous l’œil témoin d’une caméra tv, commence le pari dans un parking
à l’aide d’un jeu de clé et d’une paire de tenaille brahim s’automutile
les trois autres sont autour de lui, comprennent qu’il est trop tard
on ne fait plus machine arrière, brahim se perfore, ne s’arrête plus
une vraie p-ssoire
il se charcute et se vide de sa vie pendant de longues heures
la mort l’étreint durement dans un sursaut de douleur
aimé éteint la caméra, lui et les siens pleurent
isaac éclate en sanglot lorsqu’ils finissent d’inscrire en lettres de sang : ”crève sale beur”
ainsi s’achève l’acte i de cette tragédie tristement moderne
ainsi s’achève le chemin du jeune brahim et la saveur de l’existence n’est plus la même
la famille est bouleversée, les proches crient vengeance
des racistes ont tués brahim, elle est bien moche cette france
la mère se tord de chagrin dans les bras des quatre frères qui ne sont plus que trois
elle dit qu’elle pleure pour ses fils isaac, aimé et samba
les jours suivants les esprits s’embrument
les muscles se tendent et se nouent
brahim n’apparaît plus dans les colonnes des quotidiens, ce fait divers n’est plus dans le coup
aimé a donné rendez-vous à ses frères, dieu que cet hiver est long
leurs regards sont froids et opaques, les yeux sont vides de larmes et ils en disent long
au milieu d’une phrase, isaac frappe son pote d’un coup de batte de baseball dans le torse
s’en suivent ensuite des coups de pieds que samba -ssène de toutes ses forces
aimé crache du sang, fait signe à ces frères de poursuivre leur action
ciseaux, tournevis, cutter et marteau sont les outils de la vilaine punition
le jeu malpropre se poursuit
demain le quartier sera à nouveau secoué par le deuil
les coups pleuvent, les os craquent, le tournevis
aimé hurle à la mort quand il se le plante lui-même dans l’œil
il gémit, non pas parce qu’il a mal mais parce qu’il pense à son frère
celui qui est parti, celui-là qui le torture et celui qui le frappe
là par terre aimé est décédé ce matin vers 5h45
les médecins ont rapporté qu’il s’est vidé de son sang pendant près de six heures
à côté du corps inscrit à la craie rouge : ” tout les nègres sont des singes”
samba et isaac n’ont pas besoin de se mettre en scène pour faire rugir leur douleur

[couplet 2 : blatt]
et le jeu de la honte s’accélère
puisque la presse est trop timide arrive la dernière ligne droite
les faces des quatre frères qui ne sont plus que deux sont désormais plus que livides
à l’aide d’une scie à métaux, samba sectionne la main d’isaac
ce dernier est encordé à un arbre
avec une lame chauffé à blanc lui grave ”sale juif” dans le bas du dos
malgré les gémiss-m-nts et les sanglots de son tortionnaire isaac reste froid comme une plaque de marbre
la mutilation s’arrête, isaac s’en va, se traîne en gémissant vers une bouche de métro
la nouvelle fait le tour des médias, une bande organisée de criminels racistes sévit dans la capitale
une de leur victime s’est échappée, isaac raconte partout son histoire
le douloureux simulacre de récit, sur plusieurs colonnes le lendemain s’étale
la bande des loups blancs a déjà tué deux fois, cela va se savoir
mais contrairement à toute attente, les poutres centrales de la fable sont gommées
rapidement isaac reste seul, les noms de ses frères ne sont plus mentionnés
quand un leader religieux belliqueux s’empare du fait divers, isaac est dubitatif
désormais lui aussi a disparu dans les papiers, la radio, la télé, on ne l’appelle plus que le juif
la tragédie gagne de l’ampleur quand c’est samba que l’on retrouve
comme sorti tout droit d’une fresque moyenâgeuse, comme s’il avait séjourné dans des douves
multiples encoches de machette sur les flancs, les doigts des deux pieds sectionnés
la joue droite marquée au fer rouge on peut lire ”fuit kunta kinte”
il dira son histoire entrecoupée de sanglot de rages bidons
il la dira et la répétera en travers, en large et en long
il sera écouté quelques fois attentivement, souvent d’une manière un peu distraite
approche le dénouement du pari, il réalise que sa vie ne vaut pas tripette
isaac et samba à eux deux porte l’âme des quatre frères
isaac et samba cheminent tendus sur le sentier de la guerre
isaac, samba sans aimé ni brahim observent alentour, voient que la société déprime
isaac, samba sans aimé ni brahim semblent se noyer dans un bien mauvais film
samba est mort, c’est le jeune d’origine africaine qui est évoqué dans une poignée d’articles
samba s’est pendu, c’est le malaise des banlieues qui est responsable
isaac est mort, c’est le juif que l’on retrouve en photo sur les murs de la ville
isaac s’est tiré une balle dans la bouche, c’est une nouvelle forme d’antisémitisme qui fait ses premiers pas
ils ne sont rien, leurs noms et prénoms se sont érodés
ne sont plus que des symboles sans armes complètement décharnés
le traitement de leur malheur les a dépossédé de leur bien le plus précieux
dépecés de leur ident-té ils ne sont plus considérés que par rapport à leur teinte et leur attachement religieux
moi je suis tonio, l’hiver dernier j’ai perdu quatre de mes frères
on est des fils de quartiers pourris, on en était vraiment fier
par cette lettre je demande pardon à nos amis et à nos mères
on a voulu provoquer le système et contre ce système parfois on perd
on se voulait égaux mais ce n’est pas nous qui faisions les règles
on a peut-être été idiot, c’est parce qu’on se cramponnait à nos rêves
les loups blancs à présent ce n’est plus que moi et moi seul
j’ai conditionné dans ma caméra tv nos débats, nos idées, nos égards, nos erreurs
on refusait de croire que ce que nous étions pouvait être à la base de certains de nos malheurs
aujourd’hui je suis triste de constater à quel point vos macchabées n’ont pas la même valeur

[couplet 3 : dead’1]
nous sommes nés pauvres
rien n’a été écrit sur ce qui nous a empêché de couler
nous n’avons rien pu lire sur ce que ça voulait dire d’être rescapé
rescapé de quoi ? du crime, de la mort, de la pauvreté, personne ne peut dire ce qui est pire
j’ai pris l’habitude d’occuper mon esprit
pour ne pas à avoir ress-sser ce qui chaque jour me tire vers le vide
ce qui est le plus doux et qui à la fois nous effraie c’est la solitude
c’est en elle qu’on terre nos trésors, nos secrets
seuls avec nos pensées, nos pensées elle pèsent
tellement de place elles prennent
parfois ça empêche de respirer
nous sommes nés pauvres
nos regards s’arrêtent sur les filles aux traits marqués par la dureté de la route
ce qu’elle est longue cette foutue route
on a pas eu vraiment le choix, il a fallu qu’on invente ce qu’on voulait être
on s’est créé un monde, notre monde, on s’est mis martel en tête
un monde dans lequel le rêve deviendrait projection, le désir futur
la peur une alliée, la mort une blessure
un monde dans lequel nous pourrions mourir et revenir à loisir
un monde cruel, sans pitié, mais un monde à et pour nous
on a réussi, ça a marché, sommes sortis du trou
nous sommes vivant, tout du moins persuadés de l’être
et toujours ce fond de tristesse sourde et mal rincée au fond de nos êtres
toujours cette indicible crainte de ne pas mériter ce sort
pourquoi moi et pas un autre ?
nous sommes nés pauvres, nous sommes nés pauvres
triés et parqués, numéro de série sur les avant-bras
dûment sélectionnés, tatoués sur les tempes
dans le bas du dos une marque et un code barre
les reins déchirés à force de prendre des trempes
sagement nous rempilons, sempiternel recommencement
le front en direction du sol
génération qui met des gifles aux parents des camarades de ses propres enfants
on aurait pu noyer nos pet-ts pour tenter de faire taire la malédiction
mais on a choisi de les élever et de bannir de nos manières toute notion de dressage
l’attelage, se rebiffe, perte de contrôle, nous ne correspondons plus à vos images
j’ai rangé l’opinel, le canif, la canette, le beretta et le spliff
j’ai ressorti le gilet par-balle, je veux dire quelques lectures réactivant l’esprit critique
tout n’a pas était dit alors je me sors les doigts de la gorge
vocifère encore et encore, la tête compressé dans les paradoxes
et les défaites successives des miens comme des tiens
un rien ne vaut rien, même si on te jures qu’avec un peu de chance si tu t’acharnes tu l’auras
vos prédictions nous promettaient les barres, les tours et le cachot
on s’est extrait des tournants, ainsi vos sacro-saints propos
ce qu’on s’est fabriqué c’est un devenir, une histoire, une pensée, une armure
une lutte, une colère et une posture
et je vous vois vous demander ce qui jour après jour nous tient toujours
je vous vois vous offusquer du fait que nous sommes parvenus à déterrer l’amour
vous l’aviez si mal caché que dès la nuit tombée nous l’entendions grondé
alors par poignées de plusieurs dizaines de milliers nous sortions pour la sentir, pour palper sa présence
si nous faisions autant du bruit c’est parce qu’on ne voulait pas que vous compreniez que nous savions
que l’amour était enterré en nous, sous nos peaux, sous nos dalles de bétons
et vous avez nommé nuisance sonore ce qui n’était qu’un leurre
réunions illicite, les fausses pistes laissées par nos éclaireurs
nous vous avons abusés, nous nous sommes amusés de vos ruses, de vos sbires en bleu
nous avons essuyés des pertes à cause de la mort, accrochés à vos ceintures ce n’était pas un jeu
je vous sens étonnés, dépossédés de vos repères ethno-ident-taires
de vos cl-ssifications racistes, décalées et vulgaires
je ne me posterai plus là où vous m’attendez, vous prendrai à rebrousse-poil et à revers
je ne suis pas seul nous sommes guerriers et guerrières nés en enfer
revenus du royaume des ombres
dans mes selles les restes de ma muselière, [?] ne pourra pas nous faire taire

[couplet 4 : d’ de kabal]
je ne me posterai plus là où vous m’attendez
ma rage, mes cris je vais les transfigurer
notre hip-hop a toujours pris deux formes
une pour les censeurs, suceurs de sang, une autre hors de la norme
caméléon musique
vous n’avez rien compris, vous avez achetez les mauvais disques
énième ruse de guerre vous avez suivi les mauvaises pistes
les éléments les plus dangereux se sont fait discrets
la discrétion seule sert les véritables intérêts
pendant que vos télés, vos radios se vautraient dans l’infamie de la luxure
nous avons rapiécé nos âmes, pratiqué à haute dose la suture sous blessure
je ne me posterai plus là où vous m’attendez
vous nous avez traqué dans les nuits glaciales de nos plus beaux hivers
vous avez tenté d’empêcher le remaniement de notre langue, de notre poésie
nous avons du nous terrer là où ne se pose même pas les lueurs des réverbérés
déviants, sorciers alchimistes du verbe, experts en prise d’élan
cent pour cent soldats affamés avec du rien dans le ventre
tout ça pour dire que nous ne sommes toujours pas compris
et nous lisons tellement de saloperies sur ce qu’on est, ce qu’on fabrique
ils se lâchent perpétuellement, on a tout entendu
le mal des banlieues, la voix des quartiers défavorisés
la main mise des bandes armées, ils nous ont tout fait
tout dit, en fait pour nous ça veut dire au moins une chose
ça veut dire que de toute façon il nous prennent encore et nous prendront toujours pour des primates
des animaux aux mœurs étranges et barbarisantes, des singes mangeurs de merde
des intégristes, des vauriens incapables de s’adapter
cond-mnés à avoir le pacte sous peine de résignation, de contrat de vie au rabais
et à se battre pour le droit de vote aux immigrés
une espèce de sous-personnel ouais, sous-citoyen
une partie sale et cachée de la douce france
nan, pas la france d’en bas (haha) ça c’est un slogan publicitaire moderne
nous on est né et on a vécu dans la sous-france
on est d’ici mais sans en être
il faudrait qu’on ne la ramène pas déjà qu’on nous laisse une pet-te place là dans la cage d’escalier
je le jure, ça nous a endurci, de là, de toutes ces expérience
si regarde, de tout ça est né quelque chose
imagine un art qui se réapproprie le béton et la tuile
et la tôle et la brique
qui invente de nouvelles couleurs
qui se fonde dans l’horizon ciselé et combatte pour raconter [?] de qui nous sommes
imagine des façades entières d’immeubles se réveiller un matin maquillées et totalement relookées, âpretés à commencer une nouvelle vie
imagine que les murs soient des femmes
que l’air pourri, les gaz d’échappements et le manque d’entretien ai rendu ces femmes fades, tristes et toutes ressemblant les unes aux autres
imagine qu’une poignée de fous, fous car croyant que le monde pouvait être ce qu’on voulait bien en faire
imagine que ces fous décident de regarder ces femmes à nouveau, de leur prêter attention
de les faire renaître en mettant un peu de couleur et de nuances dans leur environnement
sur elles, un coup de blush par là, du rouge à lèvres sur celle-là, du fond de teint savamment étalé sur mademoiselle
un peu de gloss pour un sourire plus éclatant pour la miss
imagine que des pet-ts branleurs comme ils aimaient dire
imagine qu’un pincée d’humain ai vécu, se réveille un matin
un matin ces murs se sont remis à sourire parce que quelques uns durant la nuit les avaient honorés
imagine qu’on a été traversé par ça
à quoi bon écrire un rap si celui n’essaie pas de s’élever au dessus de l’amas de miasme et de brouillard ?
à quoi beau écrire un rap si c’est pour qu’il ressemble aux huit cent mille autres morceaux édités durant cette année ?
j’abats les formats de grande distribution, les formats radio, les formats rap pour sauvageon
2010, c’est l’heure des airs aux formats de salop
en réponse autant de détritus, de mépris déversés sur mon palier
en réponse à vos veines campagnes d’étiquetage sur l’art enfermé dans des boîtes à cd
en réponse à vos égarements et vos errances sur les styles et les genres, je vous présente ma pièce sonore
plus besoin d’employer le terme hardcore, il a été dévoyé, broyé, vidé de sa précieuse substance
je dis et le répète, il mérite une gifle celui qui me demande si j’aime la france
que j’aime ma mère ou mon père ne change pas le fait qu’ils sont mes géniteurs
il va falloir que tu te mettes ça dans le crâne, la france déborde de ses enfants de tout bords
elle abrite en ses murs des cocardiers, des ânes bâtés, des révolutionnaires et ses plus fidèles détracteurs
alors je t’en prie, ne viens pas me parler d’amour, là n’est plus la question
laisse moi régler mes soucis avec ma mère, douce france tu mérites une correction
si tes propres enfants te crachent à la face, s’il s’emploient à te manquer de respect, si ces faits sont avérés et observés
tu te dois de considérer la causalité plutôt que de tenter de prier par des invectives punitives
la loi si elle est de ton côté par nature ne changera pas ces états de faits
tu croules sous les attaques et les injures
tu es devenu ta propre plaie, ta propre morsure
on a observé que la violence était un langage dans les familles en total déséquilibre
quand une marque d’affection est impossible à produire
que les armes pour -ssurer, envelopper et nourir n’existent pas puisque n’ont pas été transmises ni mises en valeur
c’est le chaos qui prend ses quartiers
c’est le chaos qui régit les relations distendus, appauvris, diluées, rances et r-ssis
le chaos comme politique, comme langage, comme poétique
le chaos comme lien social

[couplet 5 : blatt]
c’est pourquoi par respect pour ce que je suis, par respect pour ce qui me remplis, je ne me posterai plus là où vous m’attendez
cette nuit est la mienne, j’irais jusqu’au bout, cherchez-moi, je disparais dans deux mesures
si la rébellion est un délit je vais commençais par dissimuler mes propres rimes
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est cette nuit que j’aime, c’est elle que j’ai choisi
une de ces nuits ou personne ne pense à vous sans que cela ne vous blesse
ce sont ces nuits que j’habite, ce sont ces nuits les plus belles
ces longues nuits de totale et salvatrice solitude
la nuit est infini, elle est une membrane qui vibre sous notre souffle
une couverture dans laquelle on se drape de peur d’être dévoré par les loups
le loups ils m’ont grignoté durant toute mon enfance
j’ai cru un moment qu’ils ne partiraient jamais, qu’ils attendaient que je danse
je suis né écureuil, j’ai eu de la chance
je suis devenu lion, il paraît que c’est très rare comme métamorphose
je suis lion, les loups à présent me craignent
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
que celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi
pourtant je sais, je sais que c’est l’amour qu’on nous porte qui nous tient en vie
qui me tient en vie et qui me rend triste aussi
pas eu d’autre choix que de faire de la tristesse mon amie, mon alliée, ma sœur
je sais que c’est cette sœur, ma sœur
qu’elle aime les hommes et les femmes, qu’elle a le sens du partage, qu’elle est allergique aux colères
j’aime ma sœur
une nuit je me suis senti vide, j’ai eu l’impression que ma sœur était partie
la vérité c’est qu’elle m’a quitté un court instant mais j’ai tout de même eu peur
les loups ils n’étaient jamais très loin alors je me suis fait une belle entaille dans le dos et j’y ai caché ma sœur
de sorte qu’elle ne me quitte jamais quels que soient mes peurs et mes douleurs
dorénavant je la porte en moi, on dit qu’elle me barre
on cohabite en toute simplicité
son domaine est sp-cieux mais elle ne me dérange pas
nous vivrons dans une bonne entente
nous survivons dans une descente lente
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
ils ne savent pas, les gens ne savent pas combien nous sommes nombreux
ils ne savent pas comment les lettres ont pu planter leurs bruits et leurs râles et leurs mensonges et leurs cert-tudes
ils ne savent pas que nous sommes fait de feu
les gens ne savent pas que nous sommes d’autres gens, que nous sommes eux
ils ne savent pas que nous avons percé le secret de la lune
qu’à présent elle est nôtre et que nous pouvons la séduire si elle le consent
ils ne savent rien de nous que nous cachons
nous nous dissimulons sous une coiffe ou une armure ou les deux
nous sommes caméléons invisibles, notre stratégie est inviolable puisque notre survie dépend du fait qu’ils ne peuvent ni nous reconnaître ni nous suivre
nous sommes invisibles
nous cachons la profondeur de nos âmes sous d’épais manteaux de cuir qui épouse parfaitement la forme de nos corps
de sorte qu’ils nous croisent, nous toisent et nous côtoient sans rien voir, sans rien savoir, tu peux me croire
nous sommes les amants de la lune
quand la nuit tombe nos mentaux nous les déposons au pied de nos lits
ou nous les accrochons jamais très loin de nos lieux de vie
et nous devenons enfin qui nous sommes, je le jure
nous déposons nos peaux et devenons nous-mêmes en toute simplicité au creux de la nuit
j’aimerais tellement que cette-ci ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi

[couplet 6 : dead’1]
alors je vais prendre cette pet-te caisse de bois, je vais m’-sseoir, et je vais rester auprès de cette nuit, je vais veiller la lune et les étoiles
et patiemment je vais attendre que le temps, l’univers et le reste s’arrêtent ensemble
oui c’est ce que je vais faire, je ne serais plus sage
je serais l’écoulement entre le sommet de la lune et le repos du soleil
je serais l’esp-ce entre les secondes et leurs mères
je serais l’attente dans toute sa longueur, je serais sec, creux et patient
je ferais cela dans un but ultime, conjuguer durant un temps mon moi à la première pluriel
devenir les autres, me rapprocher de toi, devenir un de ceux-là
être celui qui est l’âme apaisé, le regard solide, les épaules relâchées, les gestes souples
ce que je souhaite c’est une lune de miel époustouflante qui permettra ce voyage
c’est pourquoi je veux épouser cette nuit
j’aimerais tellement que celle-ci ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi
après notre union le monde changera, nous modifierons les perceptions d’autrui
puisque nous nous dévoilerons enfin au grand jour
nos visages seront découverts, nos ôterons nos peaux en extérieur en plein jour
les gens, ceux qui nous montraient du doigt avant même que nous nous mettions à bouger
ceux-là même qui prétendaient sentir notre odeur dès que nous mettions une jambe dehors
ceux qui affirmaient avoir honte, que nous étions entrain de pourrir et que cela nous rendait contagieux
d’après ceux-là il fallait nous éviter
ceux qui racontaient aux oreilles les plus démunis que nos capuches servaient à ne pas nous reconnaître tellement le crime, le larcin dormaient en nous, tellement le mal était tapi à nos côtés, tellement nos mains étaient faites pour voler, nos yeux pour épier, nos pieds pour fuir
ceux-là, ce sont précisément ceux-là qui vont changer, qui vont changer
ils réapprendront à déchiffrer nos prunelles
nos yeux s’expriment à leurs manières, pour nous découvrir il faut lire le braille
ils verront que nos sommes eux-mêmes
que finalement nous sommes cousins, frères, sœurs, parents, de lune et de douleur
ce que nous sommes nous avions cesser de le clamer tant cela était devenu vulgaire et opposé à l’image que nous nous faisions de nous autres
ce qui les a tenu c’est la dignité en toute circonstance
la dignité c’est elle qui coûte le plus cher
elle use une partie du cœur, de l’âme et du corp
les anciens nous ont dit qu’il existe en l’homme une calotte osseuse recouverte d’une muqueuse très fine qui est enfermée dans un muscle
ils racontent que cette excroissance est liée par un fil très fin à une fibre de notre connaissance
ils nous enseignent que c’est l’endroit où dans le corps se loge la dignité
qu’elle est toute pet-te puisque son fonctionnement engage un processus vital
chacun de nous l’aurait en lui quelque part, de forme et de fragilité diverse
il y a des moments où le corps cède
parfois c’est elle, la calotte osseuse recouverte d’une muqueuse très fine qui est enfermée dans un muscle, liée par un fil très fin à une fibre de notre connaissance
et quand on est touché à cette endroit, quand on se retrouve blessé, un genou à terre ou les deux
notre seule et unique chance de salut se trouve là, toute proche, en nous
c’est cela qui est écrit au fond de nos iris, c’est cela qu’il faut lire
c’est en s’aidant qu’on se rend compte de notre épaisseur
notre densité elle est consécutive notre capacité à prendre
donner et recevoir
et pour nous l’amour ne saurait être autre chose
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
se tenir droit, le menton haut, le visage tourné vers le lointain

[couplet 7 : d’ de kabal]
refuser les compromissions juste pour continuer à pouvoir se dire qu’on aime être qui on est
il ne nous reste que cela
nous fort heureus-m-nt nous sommes nombreux
tellement nombreux que nous ignorons à quel point nous sommes ensemble
cette nuit n’existe que pour que nous et vous et eux devenions nous et nous et nous
une fissure dans le ciel incandescant de cette nuit qui ne ressemble à aucune autre
une brèche dans l’esp-ce, une brèche dans les dimensions, une brèche dans les éléments, une brèche dans l’esprit et dans le temps
un instant ouvert qu’on a éventré pour qu’il dure
il ne dure qu’une poussière alors nous nous faisons larmes de poussière pour parvenir à nous y glisser et nous y -sseoir et nous y abreuver
c’est dans cette larme de poussière que nous boirons le thé sacré ensemble
nos peaux, nos peaux déposées à nos pieds, nos calottes osseuses découvertes
nudité totale, hommes et femmes de volonté sublimés
la colère et la force, la volonté et la lutte, la pugnacité et la foi, la dignité et la révolte, l’amour et la paix, le temps et l’origine, la justesse et la nuance, la terre et l’eau, la chair et la pensée, le feu et l’air, la connaissance et sa quête, l’histoire et l’oubli, le faire et le dire, la palabre et l’écoute, la filiation et la transmission
tous -ssis autour d’une même théière
partage du breuvage des hommes et des femmes de volonté sublimés
l’amour ne saurait être autre chose
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
et nos faces nues de toute peau, que nous raconterons en toute franchise
nous apprendrons ensemble l’écoute de celui qui est à nos côtés l’écoute de celui qui est en face et l’autre juste à sa droite qui fait écho à ce que portait celui qui semble si loin de moi et finalement tellement proche de nous tous

[couplet 8 : dead’1]
nous parlerons de nos mythes, des histoires et des légendes qui nous ont faites
de fondations de charpente, de poudre, de pilier
j’apprendrais de toi ce que je pensais
j’ignorais qui en vérité sommeillait là entouré de ligament qui tient ma calotte osseuse recouverte d’une muqueuse très fine qui est enfermée dans un muscle, liée par un fil très fin à une fibre de ma connaissance
nous parlerons de dignité, dans cette trouée qui ne s’ouvre que tout les mille ans
nos anciens ont enseignés à certains d’entre nous l’art et la technique d’éventration de cette brèche étroite comme une poussière
ils ont transmis à d’autres la faculté de nous réduire en larmes de poussières
de sorte que nous puissions nous -sseoir au bord de cette percée et y siéger et s’y rencontrer
à quoi bon ouvrir une faille sans pouvoir s’y s’-sseoir ?
à quoi bon devenir postillon presque invisible sans pouvoir toucher la poussière ?
chacune de nos tribus dispose de mille ans pour établir le et les contacts qui permettront d’être aptes à devenir nous
afin que le temps venu nous puissions nous établir ensemble, une ligne entière
l’amour ne serait-être autre chose
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
cette nuit commune, cette nuit commune unique
union, cette nuit comme union, communions ensemble
je revois nos jeunes années, nous n’étions pas des enfants comme les autres
notre sensibilité au monde nous rendait fragiles, perméables, fébriles, trop accessibles
nous avons eu tous autant que nous sommes une enfance bercée par les doux chants de mères chagrines
elle nous enlaçaient dans ses berceuses, matin et soir
mère chagrine n’était pas qu’une idée ou un état d’esprit
elle était un appuie-tête, une paire de draps, un livre de chevet

[couplet 9 : blatt]
une lampe qui éclaire dans la pénombre, un reflexe ou une seconde peau
nos larmes continûment sur nos joues sans que nous nous en rendions compte
elles n’étaient pas apprivoisés
larmes orphelines perlent sous la surface de nos faces sans que nous les commandions, sans que nous les sentions
pour nos parents y avait aucun doute, nous étions des enfants d’ailleurs
organiques connectiques de l’étrange
et cela pouvait nous mettre en danger
mon meilleur camarade il avait mon âge, il était comme moi
il disait à ses parents qu’il y avait une erreur
qu’il n’avait pas été livré dans le bon corps, qu’en vérité il aurait dû être une fille
un soir il est monté dans sa chambre en disant ”puisque c’est comme ça je pars”
il s’est couché sans même manger, il s’est endormi des sanglots plein la mâchoire
je suis certain qu’un jour il se réveillera
c’est quand les pet-ts comme nous de partout et d’ailleurs
pet-ts des grandes villes, des bourgs, des montagnes ou des plaines
pet-ts des rues, des imp-sses, des boulevards et des ponts
pet-ts crottins, scélérats de bonne famille ou carrément bourgeois
pet-ts des caves, des palaces, des palais ou des cases
pet-ts d’autres pays déracinés, perdus ou tout juste retrouvés
instruits, surprotégés, pet-ts privilégiés ou en danger
pet-ts de toutes religions, de toutes cl-sses
c’est quand tous ont commencés à s’éteindre étreints par la tristesse que les adultes ont compris qu’il fallait nous considérer différemment
nous étions différents, différents et nombreux
avec l’âge chacun d’entre nous a appris à reconnaître celui ou celle qui en fait est des nôtres
ce sentiment dérangeant de mouvoir ses journées dans la cervelle d’autrui
si on le peut c’est qu’ils nous y autorisent
c’est qu’ils savent que nous sommes proches
éloignés et différents et proches

[couplet 10 : d’ de kabal]
et les mots s’envoleront pour recouvrir leur sens originel
résonance plusieurs fois millénaire de sons oubliés de tous
mélodies érodées aux vibrations connues de tous, de chacun et chacun devient tous
et tous devenons nous, un nous le temps de larmes de poussières
pour que la cohésion l’emporte sur le chaos, la vérité sur la peur, l’échange sur l’autarcie, l’amour ne serait être autre chose
et cette nuit revêt des allures d’éternités
des corps trempés dans la sueur et la poussière d’asphalte
des esprits exaltés qui bouillonnent sans pose ni halte
un ram-ssis de vagabond qui se réunissent quand le jour tombe
un bruit sourd et compact qui ébranle jusqu’au squelette de ton immeuble
un tremblement lourd qui t’empêche de dormir
des hurlements proches de la transe qui te font frémir
tu n’es pas idiot, tu es ignorant de ce qui se p-sse dans ta ville
des silhouettes s’agitent, les apparences sont hostiles
ce sont les danses barbares

[couplet 11 : blatt]
ce sont nos danses barbares
il a fallut qu’on raconte notre opiniâtreté, notre rage face à ce monde et ses principes sclérosés
il a fallut qu’on se redresse pour dire et redire que nous étions à nouveau debout et droits
que nous ne croyons plus en rien, que nous entendons édicter nous-mêmes nos tables de lois
tout en restant stable dans le chemin droit
dangereus-m-nt motivés, décidés à en découdre
chacun de nos membres se crispe comme touché par la foudre
mouvement syncopé, rythme binaire possédé, difficile de nous suivre
vibrer c’est vivre, écrire les lignes de notre manuel n’est pas facile mais on y arrive
crachant nos tripes à chaque mouvements
persuadés de mourir si l’organique nous abandonne
souplesse de rigueur, p-ssion et persévérance sont aussi nos sœurs
l’heure tourne
les difficultés s’embr-ssent, jamais ne se contournent
on est tous morts plusieurs fois
ce qui nous tient : l’adrénaline et les crampes après le combat
nan ce n’est pas qu’un exutoire c’est devenu notre profession de foi
les danses barbares après ce soir
tu pourras nous reconnaître à nos visages et nos regards profond et lointains, connectés à d’autres chemins
en attendant on continu de bouger la nuque et les reins puisque c’est notre moyen de crier qu’on est là
nos muscles se tendent pour crier qu’on ira partout où il y a la moindre place
rien n’efface les plaies et la honte, nous érigerons notre temple, nous ne donnons pas l’exemple
le corps et l’esprit ne font qu’on, invest-t du don de danse
nous danserons dans toutes les positions
quel que soit le climat social, moral ou politique nous danserons
on arrête pas un tigre qui s’apprête à bondir
est-ce qu’on arrête un train lancé à toute allure ?
on meurt chaque jour c’est l’époque
nos corps épousent la rébellion même si nos âmes suffoquent
danse jusqu’à ce que tes muscles n’en puisent plus
si la vie est douloureuse dis-le, avec ton regard et tes tripes dis-le
moment présent comme si c’était le dernier
danse barbare pour ne pas imploser

[couplet 12 : dead’1]
et les mots s’envoleront pour recouvrir leurs sens originels
résonance plusieurs fois millénaire d’un son oublié de tous
mélodies érodées aux vibrations connus de tous, de chacun
et chacun devient tous
et tous, devenons nous
un nous le temps d’une larme de poussière pour que la cohésion l’emporte sur le chaos, la vérité sur la peur, l’échange sur l’autarcie
l’amour ne saurait être autre chose
et cette nuit revêt des allures d’éternité
nous tendrons une toile immense, elle s’étend à perte de vue
nous la tendrons ensemble
nous avons besoin de tous nos bras afin qu’elle soit le plus à plat possible
qu’on puisse l’utiliser à bonne escient, une toile gigantesque âgée de mille ans
lorsque elle sera bien à plat étendu par nos soins, nous profiterons de cette larme de poussière qui dure une éternité pour la lessiver précautionneus-m-nt, délicatement
c’est une toile de mille ans d’âge, tous et toutes une peau de chamois à la main nous la sécherons précautionneus-m-nt, délicatement
une toile d’une largeur démesurée, afin que nous puissions l’utiliser à bon escient
quand elle sera propre et sèche nous chanterons nos vieux chants qui ne sortent de vieilles bouches qu’au moment d’accompagner nos morts vers leur nouvelle demeure
nous entonnerons nos vieux chants chacun dans nos langues, chacun dans nos mélodies qui se mélangeront pour ne faire qu’une voix douce et dense, puissante et large, profonde et lointaine
c’est à cet instant, quand nos chants ne feront qu’un, que nos mélodies deviendront notre parole
c’est à cet instant que nous quitterons nos muscles et nos os et nos nerfs
nous déposerons précautionneus-m-nt, délicatement nos blessures

[couplet 12 : blatt, d’ de kabal, dead’1]
et nos peines
et ce qui nous encombre, sur la toile
d’une largeur démesurée
de mille ans d’âges, nous habillerons nos écorchures
nos plaies
d’une toile immense
lavée par nos soins
nous habillerons nos coupures
nos c-ssures
de mille ans, d’une toile d’une largeur démesurée
du même âge, lavée par tous nos soins, lavée par tous nos soins
à tous

[couplet 13 : dead’1]
quand nous aurons déposé et nos blessures, et nos écorchures et nos c-ssures et nos peines et nos plaies
il nous restera cette toute pet-te calotte osseuse recouverte d’une muqueuse très fine enfermée dans un muscle, liée par un fil très fin à une fibre de notre connaissance
et la nuit ne sera pas encore achevée, une larme de poussière de mille ans d’âge c’est très long
l’amour ne saurait être autre chose
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
cette nuit commune, cette nuit commune unique
union, cette nuit comme union, communions ensemble

[couplet 14 : blatt]
la nuit nous a tout donné
elle est exténuée, s’apprête à se retirer pour mille ans
nous tous sommes là
chacun récupère ses biens, ses biens les plus précieux
ses blessures, ses écorchures, ses c-ssures et ses peines et ses plaies
chacun récupère ses biens précieux qui ont trempés dans les sens des précieux biens des autres et des autres et des autres encore
nos blessures, nos écorchures, nos c-ssures et nos peines et nos plaies
la nuit se retire accompagné par des perles d’eau salée sur nos joue à tous
eau salée de joie, de bonheur et d’apais-m-nt
plus que mille ans
et nous devenons au levé du jour des anciens à notre tour
plus que mille ans
c’est le peu de temps qu’il nous reste pour raconter ce que nous avons reçu
et chaque tribu doit s’attacher à transmettre aux siens ce qui plus tard dans quelques temps sera nous
de transmettre l’histoire de la brèche, de la calotte osseuse, de la poussière et de sa larme
des blessures, des écorchures, de l’amour, l’amour ne saurait être autre chose
et d’enseigner aux pet-ts que les loups sont effrayants parce qu’ils sont les gardiens de la nuit
les gardiens de cette nuit
j’aimerais tellement que cette nuit ne finisse jamais, je l’ai choisi
c’est celle-là que j’aime, c’est cette nuit que j’ai choisi d’épouser
cette nuit commune, cette nuit commune unique
union, cette nuit comme union, communions ensemble

[couplet 15 : d’ de kabal]
nous avons rapiécé nos âmes
pratiqué à haute dose la suture sur blessure
je ne me posterai plus là où vous m’attendez
vous nous avez traqués dans les nuit glaciales de nos plus beaux hivers
vous avez tenté d’empêcher le remaniement de notre langue, de notre poésie
nous avons dû nous terrer là où ne se pose même pas la lueur des réverbères
déviant, sorcier alchimiste du verbe, expert en prise d’élan
cent pour cent soldat affamé avec un rien dans le ventre
je ne me posterai plus là où vous m’attendez
cette nuit est la mienne, j’irais jusqu’au bout, cherchez-moi, je disparais dans deux mesures
si la rébellion est un délit je vais commencer par dissimuler mes propres rimes
mhh mhh mhh…

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